En écrivant avec des plumes Pilot/Namiki...
Posté : 07 mai 2011 11:21
J’ai souvent écrit ici mon goût profond pour les plumes anciennes, particulièrement les allemandes et certaines américaines, le plaisir que j’ai à les utiliser, à les écouter, à écrire avec elles aux petites heures de la nuit. Je n’ai presque jamais ressenti le même plaisir avec des plumes modernes. Pourtant, ce matin, je m’aperçois que je porte dans mon sac trois stylos modernes ou récents de la même marque (par « récent », j’entends « des années 70 », ce qui va en faire sourire certains), trois Pilot ou Namiki dont un rare et discret 72 de 1994 nouvellement arrivé.
Je pense depuis longtemps que les plumes japonaises sont aujourd’hui parmi les meilleures du monde, celles qui offent le plus de variété associée à des qualités hors du commun, qu’elles viennent de chez Pilot ou Sailor.
J’utilise une douzaine de Pilot/Namiki depuis quelques années, surtout des plumes fines, plus deux ou trois M ou B excellentes, mais qui m’intéressent un peu moins, même si elles sont excellentes en usage courant. La qualité de la plume fine du premier venu, un stylo des années 70 essayé quelque part sur ce forum, m’avait frappé d’emblée, mais je ne me suis réellement rendu compte de l’agrément de ces plumes que l’année passée, quand j’ai commencé à chercher de petits stylos des années 70 encore. J’avais attendu des années avant d’acheter un merveilleux Myu 701 à la plume en acier, plume qui m’a immédiatement captivé par sa finesse, sa douceur et sa précision. En cherchant des cousins pour lui tenir compagnie, les petits stylos effilés, très fins, très courts quand ils sont fermés, sans rien qui accroche la main, typiques de ces années-là que les Japonais ont été les seuls à fabriquer et qu'on trouve presque pour des queues de cerise aujourd'hui, je me suis aperçu que toutes, absolument toutes les plumes fines de la marque partageaient ces mêmes caractéristiques de douceur et de précision très particulières que je ne retrouve pas ailleurs, que les stylos aient été fabriqués il y a quarante ans ou qu’ils soient fraîchement sortis de l’usine. Je prends le pari qu’à l’aveugle, je reconnaîtrais entre cent une plume fine Pilot.
On connaît assez mal la grande variété des plumes que propose aujourd'hui la marque. Mon but n’étant pas d’en écrire l’histoire ni le catalogue, je donne quelques liens en fin de message. Il y en a de fermes, d'autres qui qui répondent à des usages particuliers, il en est de souples, il en existe d’assez flexibles, de la petite plume n°3 à la grande n° 50, en passant par la plume du Falcon (le stylo) et la plume Falcon proprement dite, celle qui est échancrée sur les côtés. J’en passe.
La plupart des plumes Pilot que j’utilise sont des plumes fines rigides, montées la plupart du temps sur des stylos fins et légers. Ces plumes ont été fabriquées au fil des années dans des formes très différentes, des plumes qui prolongent la section, semi-capotées parfois, à plusieurs trous, jusqu'aux aux plumes classiques habituelles. Au premier abord, elles ne semblent rien avoir de particulier, rien qui vous prenne ou vous transporte, rien qui semble sortir du lot ordinaire. Pas de personnalité hors du commun, pas d’exubérance, rien qui déborde. Elles n’ont pas le charme sombre, la suavité, ou encore l’espièglerie de certaines plumes anciennes. Elles sont seulement nettes, précises et très légères. Elles pourraient être un peu dures, mais leur légèreté gomme cette dureté. Ce sont des plumes aériennes qui donnent l’impression d’à peine effleurer le papier. On peut les rendre un peu plus flottantes encore en utilisant une encre transparente à la sensation un peu plus aqueuse que d’autres comme l’Iroshizuku Kiri-same grise. Le sentiment de facilité est encore accru par l’alimentation parfaitement régulière, qui ne bronche ni ne varie jamais, des Pilot/Namiki. Elles apaisent et pacifient naturellement l’écriture, une chose que je n’ai que rarement rencontré avec d’autres plumes. Elles rendent naturellement la main légère. Le plus étonnant, comme je l’ai dit, est la régularité d’une plume à l’autre : d’une décade à l’autre, on retrouve les mêmes caractéristiques, les mêmes sensations, le même rendu. Loin de ces plumes, il me faut retourner en chercher une, j’ai l’impression de ne pas pouvoir écrire sans elles.
Kiri-same : c’est pour moi l’encre qui va le mieux, le plus naturellement à ces plumes, une encre presque impalpable de brume et de vent, qui disperserait les mots à peine déposés sur la feuille de papier. Presque toutes sont encrées en Kiri-same.
On comprend à l’usage pourquoi la plume fine est celle que préfèrent les Japonais pour écrire les kanjis.
Je ne vais pas faire le tour de toutes les plumes Pilot/Namiki. J’ai déjà dit préférer les fines. Mes Custom 74 (que m’a fait découvrir pilotnamiki) sont montés avec des petites n° 5 M ou B standard, bonnes plumes, mais sans vraiment grand-chose qui les différencie d’une belle Sailor, par exemple (j'aurais peut-être même ici une petite préférence pour celles-ci). Ces plumes existent en SF (Soft Fine), SM, etc… légèrement souples. Le reste de mon écurie se compose de n°10 rigides ou de plumes Elite, Myu ou autres plus anciennes, en acier ou en or, rigides également, aux formes différentes mais au toucher étonnament quasi-identique.
Un mot sur le Falcon (le stylo, pas la plume du même nom). Je voulais en essayer un depuis des années. J’en ai trouvé un (le petit modèle très léger, classique en plastique noir) l’année dernière en plume SF. Premiers essais peu concluants où je trouvais la plume trop dure, manquant de subtilité. Il est donc retourné passer l’hiver au placard d'où je l’ai récemment ressorti pour le redécouvrir, j’en suis maintenant fondu. La plume n’est pas une flexible, elle est seulement souple, elle demande un effort certain – vite fatigant - si on cherche de la variation de trait, laquelle n'approchera jamais sans modification ne serait-ce qu'une semi-flexible ancienne. Mais en usage courant, avec la main légère, c’est un bonheur. La plume partage avec ses sœurs rigides et plus rondes une grande précision et une belle légèreté, avec sur elles l’avantage d’un trait plus net et plus incisif, aux bords plus tranchés (selon la tenue, elle peut même gratter légèrement, ce qui n’est pas forcément désagréable, on sent alors bien le papier). On peut jouer sur le rendu du trait en choisissant l’encre qui va remplir le stylo. De plus, la forme particulière de cette plume élancée au dessin issu des années 70, qui prolonge le corps, qui fait ressembler le stylo à un pinceau, est très plaisante à mes yeux.
Il me semble également que l'extrême sobriété de ces stylos la plupart du temps sans grand chose qui détourne l'attention participe, en ce qui me concerne, du plaisir d'écrire avec eux.
Fin de ces quelques mots sur le plaisir de ces plumes. Je ferai quelques photos plus tard quand j’aurai un moment.
Quelques liens vite fait. Il en existe d'autres, dont un document Pilot archi-connu avec des exemples d'écriture, je ne remets pas la main dessus.
http://kmpn.blogspot.com/2008/11/pilot-custom.html
http://www.fountainpennetwork.com/forum ... ntry511501
Jimmy
Je pense depuis longtemps que les plumes japonaises sont aujourd’hui parmi les meilleures du monde, celles qui offent le plus de variété associée à des qualités hors du commun, qu’elles viennent de chez Pilot ou Sailor.
J’utilise une douzaine de Pilot/Namiki depuis quelques années, surtout des plumes fines, plus deux ou trois M ou B excellentes, mais qui m’intéressent un peu moins, même si elles sont excellentes en usage courant. La qualité de la plume fine du premier venu, un stylo des années 70 essayé quelque part sur ce forum, m’avait frappé d’emblée, mais je ne me suis réellement rendu compte de l’agrément de ces plumes que l’année passée, quand j’ai commencé à chercher de petits stylos des années 70 encore. J’avais attendu des années avant d’acheter un merveilleux Myu 701 à la plume en acier, plume qui m’a immédiatement captivé par sa finesse, sa douceur et sa précision. En cherchant des cousins pour lui tenir compagnie, les petits stylos effilés, très fins, très courts quand ils sont fermés, sans rien qui accroche la main, typiques de ces années-là que les Japonais ont été les seuls à fabriquer et qu'on trouve presque pour des queues de cerise aujourd'hui, je me suis aperçu que toutes, absolument toutes les plumes fines de la marque partageaient ces mêmes caractéristiques de douceur et de précision très particulières que je ne retrouve pas ailleurs, que les stylos aient été fabriqués il y a quarante ans ou qu’ils soient fraîchement sortis de l’usine. Je prends le pari qu’à l’aveugle, je reconnaîtrais entre cent une plume fine Pilot.
On connaît assez mal la grande variété des plumes que propose aujourd'hui la marque. Mon but n’étant pas d’en écrire l’histoire ni le catalogue, je donne quelques liens en fin de message. Il y en a de fermes, d'autres qui qui répondent à des usages particuliers, il en est de souples, il en existe d’assez flexibles, de la petite plume n°3 à la grande n° 50, en passant par la plume du Falcon (le stylo) et la plume Falcon proprement dite, celle qui est échancrée sur les côtés. J’en passe.
La plupart des plumes Pilot que j’utilise sont des plumes fines rigides, montées la plupart du temps sur des stylos fins et légers. Ces plumes ont été fabriquées au fil des années dans des formes très différentes, des plumes qui prolongent la section, semi-capotées parfois, à plusieurs trous, jusqu'aux aux plumes classiques habituelles. Au premier abord, elles ne semblent rien avoir de particulier, rien qui vous prenne ou vous transporte, rien qui semble sortir du lot ordinaire. Pas de personnalité hors du commun, pas d’exubérance, rien qui déborde. Elles n’ont pas le charme sombre, la suavité, ou encore l’espièglerie de certaines plumes anciennes. Elles sont seulement nettes, précises et très légères. Elles pourraient être un peu dures, mais leur légèreté gomme cette dureté. Ce sont des plumes aériennes qui donnent l’impression d’à peine effleurer le papier. On peut les rendre un peu plus flottantes encore en utilisant une encre transparente à la sensation un peu plus aqueuse que d’autres comme l’Iroshizuku Kiri-same grise. Le sentiment de facilité est encore accru par l’alimentation parfaitement régulière, qui ne bronche ni ne varie jamais, des Pilot/Namiki. Elles apaisent et pacifient naturellement l’écriture, une chose que je n’ai que rarement rencontré avec d’autres plumes. Elles rendent naturellement la main légère. Le plus étonnant, comme je l’ai dit, est la régularité d’une plume à l’autre : d’une décade à l’autre, on retrouve les mêmes caractéristiques, les mêmes sensations, le même rendu. Loin de ces plumes, il me faut retourner en chercher une, j’ai l’impression de ne pas pouvoir écrire sans elles.
Kiri-same : c’est pour moi l’encre qui va le mieux, le plus naturellement à ces plumes, une encre presque impalpable de brume et de vent, qui disperserait les mots à peine déposés sur la feuille de papier. Presque toutes sont encrées en Kiri-same.
On comprend à l’usage pourquoi la plume fine est celle que préfèrent les Japonais pour écrire les kanjis.
Je ne vais pas faire le tour de toutes les plumes Pilot/Namiki. J’ai déjà dit préférer les fines. Mes Custom 74 (que m’a fait découvrir pilotnamiki) sont montés avec des petites n° 5 M ou B standard, bonnes plumes, mais sans vraiment grand-chose qui les différencie d’une belle Sailor, par exemple (j'aurais peut-être même ici une petite préférence pour celles-ci). Ces plumes existent en SF (Soft Fine), SM, etc… légèrement souples. Le reste de mon écurie se compose de n°10 rigides ou de plumes Elite, Myu ou autres plus anciennes, en acier ou en or, rigides également, aux formes différentes mais au toucher étonnament quasi-identique.
Un mot sur le Falcon (le stylo, pas la plume du même nom). Je voulais en essayer un depuis des années. J’en ai trouvé un (le petit modèle très léger, classique en plastique noir) l’année dernière en plume SF. Premiers essais peu concluants où je trouvais la plume trop dure, manquant de subtilité. Il est donc retourné passer l’hiver au placard d'où je l’ai récemment ressorti pour le redécouvrir, j’en suis maintenant fondu. La plume n’est pas une flexible, elle est seulement souple, elle demande un effort certain – vite fatigant - si on cherche de la variation de trait, laquelle n'approchera jamais sans modification ne serait-ce qu'une semi-flexible ancienne. Mais en usage courant, avec la main légère, c’est un bonheur. La plume partage avec ses sœurs rigides et plus rondes une grande précision et une belle légèreté, avec sur elles l’avantage d’un trait plus net et plus incisif, aux bords plus tranchés (selon la tenue, elle peut même gratter légèrement, ce qui n’est pas forcément désagréable, on sent alors bien le papier). On peut jouer sur le rendu du trait en choisissant l’encre qui va remplir le stylo. De plus, la forme particulière de cette plume élancée au dessin issu des années 70, qui prolonge le corps, qui fait ressembler le stylo à un pinceau, est très plaisante à mes yeux.
Il me semble également que l'extrême sobriété de ces stylos la plupart du temps sans grand chose qui détourne l'attention participe, en ce qui me concerne, du plaisir d'écrire avec eux.
Fin de ces quelques mots sur le plaisir de ces plumes. Je ferai quelques photos plus tard quand j’aurai un moment.
Quelques liens vite fait. Il en existe d'autres, dont un document Pilot archi-connu avec des exemples d'écriture, je ne remets pas la main dessus.
http://kmpn.blogspot.com/2008/11/pilot-custom.html
http://www.fountainpennetwork.com/forum ... ntry511501
Jimmy